Overblog
Editer la page Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
/ / /

Bonjour à toutes et à tous,


Aujourd'hui, je vais vous faire part d'une petite partie de mes élucubrations littéraires.

 

A vous de juger si vous désirez la suite....

 

Bonne lecture et bonne journée

 

LOLO

 

 

 

                                                  L'ECORCHEE VIVE


Il y a quelques temps déjà, nous perdions notre dernier « poilu ». Avec lui s’en va toute une génération sacrifiée à cause d’une « grande guerre ».

Toute vie est précaire. Victime l’année passée d’un accident de circulation, je me sens aujourd’hui investie du devoir de mémoire.

Lorsque j’étais enfant, ma grand-mère paternelle, Hélène, bien que flamande d’origine, vivait alors en Provence, à Aubagne.

C’était toujours avec un bonheur non dissimulé que j’allais y passer mes vacances scolaires. Mon arrière grand-mère Jeanne habitait avec elle. Et comme la maison n’était pas grande, Hélène et moi partagions la même pièce pour la nuit. Alors, le soir venu, avant que le sommeil ne nous surprenne, elle me racontait son enfance, là-bas, dans la lointaine Belgique.

Ces quelques lignes relatent le souvenir de ses récits. Ne m’en veuillez pas s’il vous semble brouillon. La mémoire est sélective, mais je tâcherai de ne rien oublier.

 

                                                               INTRODUCTION

 

 

Hélène était née en 1902, au mois de Juillet, dans le petit village paisible de Tamines. Fille aînée de deux enfants elle était issue d’un couple très amoureux et uni, autant que l’on pouvait l’être en cette période encore prude.

Elle était venue avant terme. Selon ses dires, elle était si petite à la naissance, que ses parents surpris par son arrivée prématurée, l’avaient installée, pour sa première nuit, dans une grande boîte en carton.

Quelques semaines plus tard, le bébé affamé qu’elle était, malgré les tétées régulières, clamait toujours autant son insatiable appétit. Franciscus, mon arrière grand-père, lassé par ses cris, était allé chercher, avec l’accord de son voisin, dans le verger de celui-ci, une belle poire bien mûre. L’ayant pelée, il en fit sucer un morceau à l’insatisfaite. Il n’y eut alors plus de pleurs. Hélène aimait déjà le goût sucré du fruit et le tétait avidement, avec de gros bruits de succion. J’essayais d’imaginer cette grand-mère, dame d’un âge bien avancé, en nourrisson vorace. Et je riais de bon cœur.

Ce que mon esprit de petite fille d’alors n’arrivait pas à concevoir, était ce qui se cachait derrière le terrible mot « guerre ». Quand elle me la racontait, je considérais plutôt la chose comme une grande aventure où tout le monde, comme dans un jeu, faisait semblant. Ce n’est que plus tard que j’en ai réalisé toute la monstruosité et toutes les souffrances terribles qu’elle avait engendrées.

On connaît la guerre par les nombreuses images prises au front, mais peu d’entre nous ne se doute que les civils ont également souffert, parfois, au-delà de toute limite du supportable.

 

Mes arrières grands-parents habitaient donc Tamines.

Tamines, petit village minier au bord de la Sambre, fleuve serein, dont les maisons accolées les unes aux autres, aux façades propres de briques rouges, bordaient de part et d’autre la grande rue principale. Puis, près d’un café, dans un renfoncement qui faisait angle, se trouvait la toute petite maison basse de deux pièces où vivait Jeanne, mon arrière grand-mère. Je n’en ai qu’un très vague souvenir, pour n’y avoir été qu’une fois, à l’âge de trois ans.
Elle vivait là, seule, chichement, regardant à travers sa fenêtre le temps s’écouler trop lentement. Elle avait vu et vécu tant de choses ! Comment pouvait-elle espérer en vivre de meilleures !

Pourtant, Hélène venait la chercher et ce fut à contre cœur, qu’elle ferma à jamais la porte de ses souvenirs. Derrière elle, il y avait tous les bons et mauvais moments d’une vie de labeur bien remplie.

Elle vécut encore, au soleil aubagnais, quelques belles années, partagée entre son passé, me voir grandir à chaque vacance, et sa folie mystique. Comment pouvais-je lui en vouloir, elle qui prenait le ronflement d’hiver du poêle à mazout pour des cantiques chantés par les anges !

 

Elle a fini, à l'aube des ses cent ans, par clore définitivement ses beaux yeux bleus, le sourire aux lèvres ; elle retrouvait enfin les siens !

Elle repose dans le cimetière d'Aubagne, où le soleil qui lui a manqué, réchauffe le matin sa pierre tombale. Un cyprès lui procure à midi une ombre bienfaitrice, et une cigale en été berce son éternel sommeil. Elle a rejoint Franciscus, ses beaux-frères et son frère... Le calme, la définitive sérénité.

Laissez-moi, maintenant, si vous le voulez bien, vous transporter dans les couloirs du temps. Remontons ensemble chaque heure, chaque minute, chaque seconde.
Et nous voici à Tamines.

 

A la veille de la guerre, Jeanne était encore jeune. Elle avait déjà deux enfants, qu'elle adorait et élevait dans la crainte de Dieu.

Son époux Franciscus, mineur de fond, était passionné par les pigeons. Il en faisait la collection. Au fond du jardin, le pigeonnier était soigné. Quelques spécimens avaient permis à la famille, en gagnant des concours, d'améliorer le difficile du quotidien.

J'ai dans mon buffet un charmant petit service à café en porcelaine dont j'ai hérité, je ne sais comment ; il revient de si loin ! Il fut gagné, lui aussi. Et bien que les bouquets de fleurs qu'il représente soient presque effacés, c'est toujours avec beaucoup d'émotion qu'il trône sur la table des invités. Je sais que sa cafetière fut tenue entre les mains de cet arrière grand-père.

Franciscus était l'aîné de cinq enfants, tous des mâles. Et comme les parents étaient décédés, ils vivaient avec le jeune couple. Au cercle familial s'était rajouté le petit frère de Jeanne.

Cette dernière n'avait pas assez d'heures pour faire marcher la maisonnée. Entre repas et lessives, elle trouvait toujours, néanmoins, le temps de s'occuper des plus pauvres qu'eux, dans la commune.

 

 

 

                                                                CHAPITRE 1

 

 

                                                               LE BEL ONCLE

 

Hélène avait un oncle qu'elle aimait par dessus tout.

Il avait, selon elle, tout ce qu'une femme désirait. La joliesse, la sensibilité, la tendresse et la patience. Il lui faisait ses quatre volontés. Adroit de ses mains, il lui construisait une balançoire, au fond du jardin, à côté du banc, près du pigeonnier. Pour un Noël, il avait confectionné un lit magnifique, destiné à l'unique poupée de  sa nièce. Il était une parfaite reproduction en miniature, sculptée habilement.

Mineur de fond, tout comme ses frères, il cultivait le rêve de devenir, un jour, ébéniste ou menuisier. Il adorait, assis sur le banc du jardinet, le dimanche après vêpres, sculpter un morceau de bois et le transformait, à sa guise, en chien, chat, singe, ours, éléphant. Il finissait toujours par offrir à Hélène ses réalisations.

Il savait lire et écrire et avait soif d'apprendre. Sa volonté de sortir un jour de l'enfer de la mine l'avait contraint à réunir toutes ses économies dans une petite caissette en fer. C'était sa « boite à liberté », comme il disait. Elle lui donnerait, une fois pleine, la possibilité d'acheter un atelier où il pourrait exercer son adresse.

Il était en âge de se marier. L'attachement à sa famille, et les occasions rares de rencontrer une dulcinée, faisait de lui un célibataire.

Pourtant, le dimanche à la messe, les jeunes filles du village ne manquaient pas, pendant le sermon du curé, de jeter des oeillades timides vers ce bel homme. C'est qu'il avait fière allure, le Tonton chéri ! Même si sa tenue n'était pas confectionnée dans de riches lainages, il restait élégant. De grande taille, svelte, il gardait une fine moustache sur la lèvre supérieure et sa chevelure ondulée, d'un châtain foncé, soulignait des yeux verts rieurs. Rasé de près et sentant le propre, il était le symbole d'une santé encore éclatante.

Hélène était jalouse des regards enjôleurs qu'il recevait et s'empressait alors de serrer plus fortement la main de son oncle. Bienveillant, surpris par la pression de cette petite main inquisitrice, il se penchait vers sa nièce, et la gratifiait d'un sourire merveilleux. Comme elle était fière d'être entre les deux hommes qu'elle aimait le plus ; son père et son oncle.

Cependant, un jour, à la messe, il remarqua à quelques rangs devant, un magnifique chapeau de paille garni de fleurs et de fruits. Sous le couvre-chef,   les plus adorables cheveux tombaient en une énorme cascade ondulée. Ils avaient des reflets cuivrés lorsque le soleil jouait avec eux, à travers les vitraux. De là où il était, il ne voyait sa propriétaire que de dos ; une robe légère à manches « gigot ». Au fond de lui, il vint à espérer que la robe prometteuse habillait une jeune personne charmante.
Et il ne fut pas déçu.

 

 

A SUIVRE .......

Partager cette page
Repost0